Le réveil d'un gène endormi à l'origine d'une maladie neuromusculaire
Le génome humain contient de nombreux gènes inutiles, héritage de plusieurs centaines de milliers d’années. Cet “ADN poubelle“ reste normalement endormi mais selon une récente étude, certains de ces gènes peuvent revenir à la vie et être à l’origine d’une des formes les plus fréquentes de dystrophie musculaire.
La dystrophie facio-scapulo-humérale (FSHD) fait partie des dystrophies musculaires héréditaires caractérisées par une dégénérescence irréversible plus ou moins rapide de certains muscles. Elle constitue la troisième plus fréquente chez l’homme après les maladies de Duchenne et de Steinert et affecte un individu sur 17 000. Le nom de la maladie reflète sa progression : elle atteint d’abord les muscles de la face (incapacité à sourire et à fermer les yeux en dormant), ensuite les épaules (scapulo) et puis des membres (humérale).
Les premiers symptômes apparaissent souvent vers l’âge de 20 ans ; 20 % des patients dépendent d’une chaise roulante vers 45 ans. C’est une maladie génétique transmise selon un mode dominant, c’est-à-dire que, statistiquement, chaque patient transmettra la maladie à la moitié de ses enfants. Il n’existe pas de médicament pour cette maladie. Et avant de pouvoir mettre un traitement au point, il est primordial de mieux comprendre l’origine de cette maladie.
En 1999, l’équipe de l’Université de Mons a émis l’hypothèse selon laquelle la FSHD se déclenche suite à l’activation d’un gène toxique dans de l’ADN poubelle sur le chromosome 4, une répétition anormale d’un gène baptisé DUX4. La même équipe a pu conforter son hypothèse en montrant que le gène DUX4 était actif dans les muscles des patients atteints et non dans celui des personnes en bonne santé. A l’époque, cette idée d’un gène fonctionnel dans des éléments répétés paraissait complètement farfelue et semblait remettre en cause ce que l’on sait du codage génétique.
En résumé, pour exprimer un gène, la cellule doit le copier à partir de l’ADN sous forme d’un ARN messager, qui va ensuite transcrire ce gène pour fabriquer de la protéine. Les fragiles ARN messagers bénéficient d’une protection de la part d’une enzyme (la queue polyA) lors de leur synthèse. Cette enzyme réagit à un signal présent sur le gène qui est copié dans l’ARN. Mais, alors que le gène DUX4 n’a pas de signal polyA dans sa séquence répétée, comment se fait-il qu’il puisse être codé en protéine DUX4 dans les muscles des patients ?
Deux chercheuses de l’Université de Mons ont découvert que l’ARN stable de DUX4 (donc celui à l’origine de la protéine toxique) provenait du dernier élément de la série et s’étendait au-delà de la zone répétée. L’équipe a proposé en 2007 que si ce signal était altéré chez un individu, celui-ci ne serait pas victime de la FSHD. Pas de signal -> pas d’ARN messager stable -> pas de protéine toxique et donc pas de maladie.Pour valider cette hypothèse, 8 laboratoires de France, Italie, Espagne, Pays-Bas et USA se sont associés pour analyser l’ADN de plusieurs centaines de patients et de plus de 2 000 personnes saines. Résultat : ce modèle a été validé et le (ou l’un des) mécanisme(s) de cette maladie est ainsi identifié, permettant enfin d’envisager la mise au point d’un traitement, qui visera à bloquer la transcription en protéine du gène toxique DUX4.Luc BlanchotSources : Science publié en ligne le 19 août 2010 –
(abstract accessible en ligne)“Dystrophie musculaire FSHD : l’équipe de l’Université de Mons avait vu juste !“ – Communiqué de l’Université de Mons et de la Faculté de Médecine et de Pharmacie – 30 août 2010Click Here: camiseta rosario central